Mes écrits


Livres édités > Nouvelles > Textes philosophiques > Projets

« L’art peut-il nous enrichir ? »

 

Cela fait longtemps que ce thème me titille les méninges !...

J’ai noté, et gardé sous le coude des bribes d’idées sur mes réflexions jetées en vrac. Il fallait bien qu’un jour je puisse enfin écrire cette réflexion.

Je n’ai pas la prétention d’apporter des réponses… car, je ne fais qu’entamer une réflexion sur le sujet… mais ce sont les miennes, et elles n’engagent que moi-même.

Une chose est sûre…  si l’art devait m’enrichir financièrement… depuis plus de 50 ans que je pratique… je devrais être aujourd’hui immensément riche. Hélas… ce n’est pas le cas !

 

Avant de tenter de répondre… J’ai la coutume de définir ce que signifie certain mot clé. Comme par exemple le mot ART : Première remarque… : ART commence par la première lettre de l’alphabet. J’y vois déjà un premier signe fort.

Les encyclopédies expliquent :

«  C’est l’attitude, l’habilité, le goût à faire quelque chose… C’est pour émouvoir, sensibiliser… voire, troubler. C’est un ensemble de moyens, de procédés, de règles intéressant une acticité… une profession.

C’est l’expression désintéressée et idéale du beau. C’est une manière qui manifeste un goût, une recherche, un sens esthétique, de faire une chose selon certaines méthodes, certains procédés, certaines règles. »

 

Dans la vie de tous les jours… quelles influences « l’ART » peut-il avoir dans notre comportement ?

Nous rend t-il plus conscient ?

La véritable richesse, c’est quoi ?

 

L’homme a besoin de vivre dans l’art et dans le sacré pour se construire.

Sacré, parce qu’il fait parti de nous. Il est en nous, dès notre origine. Il enveloppe tout. C’est l’harmonie des choses. L’Art a sa place partout… et partout il y a de l’art.

Lorsque l’on est en état d’amour… lorsque l’on aime le beau, l’harmonieux, l’authenticité, et le vrai…

Lorsque la nature nous révèle toute sa beauté magique et énigmatique… et la beauté de tous les êtres vivants sur cette planète… Quand nous vibrons avec émotion et que nous sommes sensibles devant tel ou telle chose… Quand la nature de notre personnalité la plus intime s’exprime, nous rend curieux, respectueux d’autrui et de soi-même… Que grâce à notre sensibilité, nous ayons développé d’instinct, l’écoute et l’observation… Je pense que nous découvrons ce qui se cache devant l’incompréhensible, et qui se cache derrière le paraître. Nous atteignons des niveaux supérieurs et inimaginables.

Il faut savoir regarder plus loin… aller au-delà du visible.

L’art provoque le pouvoir ou la faculté de voyager dans l’imaginaire, dans l’inconscient, et dans l’invisible… afin, peut-être… de mieux comprendre le visible.

 

Notre sensibilité devant les formes, les matières, les volumes, les couleurs, la lumière et les ombres… nous transporte dans une réaction de l’inconscience.

C’est notre inconscient qui nous guide, qui nous indique ce qui est beau, et tout ce qui est bon.

L’art rend l’être humain plus sublime encore… Il l’élève… Le transcende.

Aimer le beau, le vrai et le naturel sont à la portée de tous… il faut simplement s’ouvrir, s’offrir sans retenu à l’inattendu.

Chacun a ses propres ressentis, ses propres émotions face à l’art… selon notre culture, notre éducation, nos symboles et notre personnalité… chacun a des réactions différentes sur le sujet.

Toutes ces réactions sont en discourt permanent avec notre cœur, qui nous éclairent sur la vie.

La vie, c’est de l’art… et l’art, c’est la vie.

En fait… l’art explique la vie. Ils ne font qu’un, et ils sont indissociables.

L’art inspire la discipline, les procédés, les moyens et les règles. C’est une expression idéalisée du beau, qui inspire la recherche et un sens esthétique. C’est une tendance à aller vers la perfection.

La nature fournit à l’artiste tous les matériaux… toutes les couleurs, tous les sons. D’ailleurs, les deux sont interchangeables.

La beauté de l’œuvre d’art ne tient pas à la beauté du monde. Il y a une esthétique de la laideur qui se distingue de la laideur naturelle. Les œuvres d’arts éduquent l’homme, et contribuent à la formation du sentiment de la nature qui n’est pas spontané chez les incultes. En fait… si le spectacle de l’univers peut inspirer l’artiste… celui-ci ne peut se contenter de copier ce qu’il voit.

Les différences entre la beauté et la laideur ne peuvent en aucune façon intéresser un art réduit à un simple travail d’imitation.

L’art, limité dans ses moyens d’expressions, ne peut produire que des illusions unilatérales, d’offrir l’apparence de la réalité à un seul de nos sens. Et, en fait… lorsqu’il ne va pas au-delà de la simple imitation, il est incapable de nous donner l’impression d’une réalité vivante, ou d’une vie réelle. Mais tout ce qu’il peut nous offrir, c’est une caricature de la vie.

 

Quel but l’homme poursuit-il en imitant la nature ?

Parfaire et donner une autre représentation encore plus parfaite ?

Chacun sait qu’en rentrant en rivalité avec la nature, on se livre à un artifice sans valeur.

« ZEUXIS », peintre grec de 400 ans av JC peignait des raisins qui avaient une apparence tellement naturelle, que les pigeons s’y trompaient en tentant de les picorer !

Je veux dire simplement que d’une façon générale, en voulant rivaliser avec la nature par l’imitation, l’art restera toujours au-dessous de la nature… et pourra être comparé à un ver faisant des efforts pour égaler l’éléphant !

 

Est-ce que l’art nous rend conscient ?...

Je dis oui. Oui, car il nous ouvre des portes, des voies. Plus on est en état de recherche… plus des informations et des réponses nous arrivent. Souvent même à des moments privilégiés et inattendus.

L’art peut influencer notre comportement, notre éducation et nos principes de vies.

Je pense à ceux qui ont le noble souci d’élever nos âmes… De nous arracher aux laideurs, qui soi-disant nous attristent… et où des vulgarités diaboliques qui nous menacent… et qu’ils se sont toujours efforcés de les favoriser partout au foyer… dans la cité, comme dans la vie civile… comme dans les Temples sacrés… que la religion, ou philosophie religieuse en soient l’inspiratrice par excellence, à la gloire d’un dieu virtuel.

C’est la patrie naturelle de ceux qui s’efforcent d’exprimer les innombrables incarnations du « Beau ».

C’est un principe sur lequel se sont mis d’accord, artistes et philosophes.

MICHEL-ANGE, qui était très croyant, n’écrivait-il pas que… je le cite :

« Pour donner à ses œuvres le cachet de la perfection… l’âme doit s’élever vers les cieux d’où elle est descendue… ». Puis il insistait par : « Elle ne s’arrêtera pas à la beauté qui séduit les yeux, et qui est aussi fragile que trompeuse… mais elle s’efforcera d’atteindre le principe du beau universel… ».

De son côté, KANT, plus sage… définissait le « Beau » comme un reflet de l’infini sur le fini.

Nous connaissons pratiquement beaucoup d’artistes profanes… pour ne pas les qualifier autrement… qui éprouvent parfois le besoin d’assister à des cérémonies liturgiques, à seul fin de plonger leurs âmes endolories et fatigués, dans la paix douce et rassurant de la prière… si l’on considère toutefois que l’art peut être comparable à une prière !... Personnellement, je suis de cet avis.

Si les arts ont pour but d’exprimer la beauté… N’est-il pas évident qu’ils n’atteindront jamais si bien leur but qu’en prenant pour objet : l’infini beauté ?

 

Le monde n’est qu’un vaste Temple où les âmes et les esprits s’éveillent.

L’art est une sorte d’endroit de concert où tout parle et chante… où tout brille et respire… où tout rayonne et colore de mille feux enivrants et éblouissants… depuis l’astre géant (le soleil)… jusqu’aux invisibles atomes. L’habitant des villes d’aujourd’hui, semble parfois ne plus avoir d’oreilles pour l’entendre, les yeux pour le voir, et le nez pour le sentir !... Tout comme l’éclairage artificiel et aveuglant des boulevards lui cache la vue des étoiles… et les bruits heurtés et assourdissants de ce monde, le rend incapable d’en saisir d’autres plus subtiles… telle que par exemple la musique céleste qui vient d’ailleurs, puissante et harmonieuse, et qui nous transporte généralement l’âme et le cœur.

Le rêve pour l’artiste… : Pouvoir saisir l’éphémère !... Pouvoir s’arracher de cette vie factice et anémiante !

Que l’on remette donc devant nos yeux, l’incomparable spectacle du ciel, de la mer, de la montagne et des champs… Alors, de nouveau… peut-être… l’on entendra sortir une infinité de voix et de sons qui éclatent, ou successivement grondent et soupirent, rugissent et modulent. Bruits triomphants et terribles… mélancoliques et joyeux… qui se croisent, s’enlacent, se mêlent et se fondent dans une immense symphonie multicolore. L’homme, du coup… trouve enfin sa vraie place, et son vrai rôle.

L’homme, minuscule, mais admirable résumé de l’univers… composé à la fois de matière et d’esprit… capable par l’un, de saisir et d’exprimer le sens secret de l’autre.

Il contemple alors le merveilleux spectacle… Il écoute les voix innombrables… Il contemple les couleurs du temps par la porté de ses sens… il les fait pénétrer jusqu’à son âme… laquelle s’élève par la pensée… jusqu’à la source de tout ordre et de toute harmonie.

 

Quelques mots sur la beauté… :

La beauté nous sauve parce qu’elle fait diversion. Elle est l’éclat du vrai. Elle fait diversion… car le plaisir conscient qu’elle nous offre, cache et rend possible une jouissance inconsciente. Elle nous fascine.

Nous avons besoin de nos émotions esthétiques pour que la vie en nous, puisse continuer à se métamorphoser. Nous avons besoin de la beauté pour éprouver notre différence.

Le mystère, souvent, nous effraie. Nous avons peur de ce que nous ne connaissons pas. La beauté, elle, nous propose une expérience heureuse du mystère.

Si le désir de comprendre, élève l’homme… l’obsession de tout expliquer, risque de le rabaisser. Pire… de lui interdire le bonheur. Car, tout n’est pas explicable. Quelque chose dans l’existence du monde, comme celle des hommes, dans la profondeur de nos états d’âmes, résistera toujours à l’explication.

La beauté nous donne, ou plutôt… déclenche la force, l’espoir, et redonne de l’élan à l’imagination. Le sens du beau éveille nos facultés, et favorise un plaisir contemplatif, libéré de tout questionnement. Elle est l’occasion d’un investissement libidinal.

Mais de quelle nature est cette jouissance inconsciente que la beauté nous procure ?

Lorsque survient l’émotion esthétique, l’apaisement a pour fonction de nous cacher la jouissance inconsciente.

La sublimation de la libido, et l’accès sensible… produisent un résultat qui est précisément le sentiment de paix.

Apprendre à saluer la beauté, c’est apprendre à se tenir face à son mystère, sans vouloir le réduire, ni l’expliquer… c’est apprendre à l’accueillir. Et l’accueillir, c’est plus que le contempler ; c’est y participer.

En général, nous restons silencieux face à la beauté… car nous sommes en communion. La beauté ne se regarde pas… elle se vit.

Lorsque nous admirons la beauté naturelle… nous contemplons le pouvoir créateur de la nature.

Lorsque nous admirons des œuvres humaines, nous contemplons la manière dont les artistes s’en inspirent.

Dans tous les cas, nous avons besoin de beauté pour approcher le mystère même de la vie… cette puissance d’inventivité pure.

Elle nous apprend à aimer sans posséder, comme elle nous apprend à aimer sans comprendre.

Elle nous propose de troquer l’ironie contre l’éblouissement.

 

Plus un artisan est « artiste »… ou plus encore… plus un artiste est « religieux »… plus il court le risque de vivre dans la gêne, la contrainte et dans l’obscurité. Il risque de ne plus pouvoir sortir de ce labyrinthe gluant. En un mot… de ne plus dépendre de lui-même… de perdre son identité et sa personnalité… de n’être plus tout à fait en accord avec lui-même.

Je ne les compte plus ceux qui ont vécu dans les différentes branches de l’art… Les Maîtres, voire, de très grands Maîtres… qui ont mené une existence besogneuse, voire, misérable… dans l’indifférence, totalement inconnu de leurs vivants !... et que seules leurs tombes ont reçu le baiser empoisonné de la gloire !

Ceux-là ont ma reconnaissance à titre posthume.

Comme il est difficile pour l’artiste de saisir l’imprenable, l’insaisissable… et même l’inconnaissable !

Parfois, il faut à certains des évènements inhabituels… une maladie, une dépression, ou un accident grave. Bref, toucher la mort du bout du doigt. Ou bien, se faire plaquer par l’amour de sa vie… être trahi, trompé, abandonné… etc. Pour finalement déclencher l’inspiration ultime et faire des expériences les plus extraordinaires !

La maladie, sous toutes ses formes, est là pour vous rappeler à l’ordre. Pour vous faire prendre conscience de la fragilité du corps et du cœur. C’est comme une sorte de pose forcée, qui permet bien souvent de se remettre en question, de se recentrer, et de faire le point.

C’est alors une nouvelle vie qui s’ouvre… comme une renaissance. Certains retrouvent l’appréhension du temps et de la vie, et un nouveau sens relatif de l’essentiel.

Pour d’autres… l’influence de l’art passe par autre chose, une autre démarche, un autre état d’esprit… un autre symbole. Que voulez-vous… nous sommes à une époque où le génie lui-même a besoin pour percer et pour se faire connaître, des concours bruyants et fort coûteux de la publicité !

Sans cette technique commerciale, ils ne peuvent exister et être eux-mêmes.

Le problème… c’est que l’on ne rencontre pas toujours des mécènes honnêtes qui ne sont pas avides d’argent. L’opinion publique est une masse pesante et difficile à ébranler.

Nous sommes dans une civilisation où pour réussir, il faut de l’audace, être beau parleur, calculateur, et être bon manipulateur… et avoir de la puissance par l’argent.

Pour information : certains galeristes sans scrupules… ceux qui exposent des artistes en quête de reconnaissance… prennent jusqu’à 70 % sur la vente !... comme ça, sans rien faire !

Ces parasites de l’art… Ces requins aux dents acérées, ces voyous au syndrome du billet de banque, à la hantise du porte monnaie vide… sans sentiment, ni émotion… ont le flair malin !...

Comme ils ne peuvent exister par leurs propres moyens… c’est à travers les autres qu’ils tentent de l’être.

Ce sont les rebus, les minables de la société… s’appropriant sans vergogne le talent des autres, vivant même de leurs malheurs. Il n’y a que l’épaisseur de leur porte feuille qui les intéresse…

L’art, ils ne connaissent pas !

Ce sont d’horribles prédateurs qui s’abattent sur l’artiste confiant, naïf, faible, qui espère… tel un charognard, pour dérober le fruit de son travail.

Jacques BREL les appelait « Les amputés du cœur ».

 

On n’achète pas la beauté.

C’est probablement le sens véritable des prix record atteints par certaines œuvres d’arts. Et si de tels montants indiquaient paradoxalement que l’art n’a pas de prix... que sa valeur est inestimable… que la beauté n’appartient à personne. Ils manifestent alors dans leur démesure même, l’effort voué à l’échec de celui qui voudrait posséder ce qui n’a pas de prix !

Ce qui, selon FREUD… sont des pulsions primaires.

Le plaisir esthétique est justement une sublimation de ces pulsions primaires refoulées.

Il permet de satisfaire de manière non sexuelle des pulsions sexuelles refoulées. Il permet de satisfaire une possessivité refoulée… mais sans rien posséder, par simple contemplation désintéressée.

 

Les alchimistes des Lumières avaient des images bien particulières pour désigner la transformation, ou, la métamorphose de la souffrance… en quelque chose d’essentiel pour l’âme.

J’ai un exemple qui me plaît : celle de la perle de culture.

Voyons cet exemple en tant que symbole de valeur.

L’huître avale par hasard un petit corps étranger, ou pas (car aujourd’hui, on l’implante artificiellement. C’est comme un viol). Alors une réaction s’opère immédiatement, comme un symptôme névrotique, ou d’une souffrance. Ce corps étranger est peu à peu recouvert, jour après jour. Elle y mettra le temps qu’il faudra, jusqu’à ce que ce petit corps étranger ait disparu totalement, et donc par conséquent maîtrisé.

Mais l’homme dans sa fourberie, a vu autre chose qu’une simple défense naturelle… mais une belle et grosse perle qui lui rapportera de l’argent… beaucoup d’argent !

Il restera au profiteur de cueillir cette petite boule de nacre, tuant du même coup la pauvre huître qui a souffert d’avoir en elle ce corps étranger, et qui n’a rien demandé.

Ce qui fera de lui un homme heureux,  fortuné et respecté !

L’objet du délie (car c’est un vol) sera alors exposé comme un trophée. Après des manipulations techniques par des artisans, elle deviendra une œuvre d’art, un accessoire pendu au cou ou au doigt de celles et ceux qui veulent paraître et montrer leurs réussites sociales.

 

Mais revenons à l’art…

La création artistique est éphémère… mais l’art perdure.

L’artiste sincère crée, fabrique, produit, invente, compose, construit… et réinvente. Il réfléchit sur lui-même et se remet sans cesse en question.

Le travail ésotérique est très personnel, secret… pour devenir une splendeur exotérique.

On peut dire que c’est l’art d’aller chercher en soi nos trésors cachés.

Au bout du compte… qui en sortira plus riche ?

L’artiste… dans son œuvre donnera tout. Il se livrera toute sa vie, de toute son âme, et de toute sa personnalité… n’hésitant pas à mettre son cœur et son corps à nu.

L’artiste, le vrai… remonte du plus profond de son inconscience des vérités… ses vérités !

Et s’il souffre parfois… s’il pleure… c’est qu’il est en désaccord avec lui-même et son subconscient.

Mais lorsqu’il trouve le bon tracé, la bonne couleur, le bon volume, la bonne matière, la bonne note, le bon graphisme, la bonne technique, la bonne harmonie… alors, il jubile… il retrouve le bonheur et la confiance… en redonnant un véritable sens à sa vie.

Vous savez… Pas besoin d’être nympho ou acrobate pour atteindre l’orgasme céleste et infini !... le 7ème ciel est accessible à tous !

Pour l’artiste, l’élévation à ce niveau relève d’une étroite complicité et d’un don d’amour en soi… d’une parfaite cohésion entre son inconscient et l’œuvre.

 

Comme partout, l’œuvre suppose l’ouvrier. L’artisan. Seul maître d’œuvre de son art.

Seul devant la toile ou la page blanche et vierge, pour concevoir et pour réaliser. Son but supérieur est de nous transporter vers d’autres sphères, de nous faire rêver et de nous faire voyager. Mais avant de nous faire voyager… l’artiste doit tout d’abord faire lui-même le voyage pour qu’il puisse s’exprimer et nous transmettre son idée ou sa vision.

Pour les croyants… ce sera vers un dieu… Mais pour le rapporteur de la beauté sincère, et de la vraie lumière… croyant ou pas… il s’identifiera totalement à son œuvre.

Trouver l’infaisable !... créer l’invisible en visible… trouver l’introuvable… dans la communion et la paix de l’âme dans l’union… comme une longue et douce plainte… comme une longue prière.

On le sait tous… l’artiste est en général un être fragile, sensible, émotif, qui vit à fleur de peau… Obsédé par la recherche de l’idéal, qui se lance à corps perdu dans la poursuite de l’insaisissable et fuyante beauté…

Il poursuit son rêve… vers l’harmonie totale.

Timide, mais convaincu, désintéressé, solitaire, mais méticuleux, perfectionniste et sincère… l’artiste ne se rend pas compte des pièges qui lui sont souvent tendus. Il n’imagine même pas qu’on puisse le trahir, le tromper… que l’on puisse le manipuler en lui faisant des promesses ou des remarques flatteuses… mais ô combien irréalistes.

Nous le savons trop bien… quiconque qui ne fait pas assez de bruit, ou qui est trop faible… est vite oublié et abandonné à ses rêves, à ses difficultés et à sa solitude.

 

Pourtant… n’est-il pas un devoir de justice et de reconnaissance pour l’importance des travaux fourni, de la beauté du service rendu… que de donner l’impression réconfortante que les maîtres en la matière soient compris, soutenus, reconnus et aimés par tous ?

Comment faire comprendre… comment faire prendre conscience que l’amour et le respect sont essentiels à tous épanouissement de tout être ?

Car, l’amour réveille en soi le meilleur, et donne un sens au pire.

 

L’amour… c’est l’enseignement initiatique permanent de la science. Il introduit l’éternité dans l’humble expérience du quotidien. Il parvient à cette absolue tangence du ciel et de la terre qui définissent le bonheur. L’amour vit du symbole. C’est la nourriture essentielle qui nous reconstitue sans cesse.

Tiens « Amour »… commence lui aussi par la lettre A !

L’amour pénètre le secret des paroles et des gestes. Il les rapproche les uns des autres, chacun se situant à la lisière du mystère de l’être… qui transforme parole en geste, et le geste en parole.

Enfin… l’amour répudie toute mesure à la faveur de l’élan, de la grâce du don désintéressé de soi.

 

Alors… à la question de savoir si l’art peut nous enrichir… je n’hésite pas un seul instant… je dis oui !

Nous avons besoin de l’art pour vivre dans la sincérité, pour s’affirmer, pour trouver notre personnalité… dans l’honnêteté… pour nous ouvrir aux mondes connu et inconnu… pour nous faire progresser et évoluer. Pour embellir nos cœurs, nos âmes et nos corps.

L’art rend meilleur, et il sensibilise à toutes choses.

Sans l’art… sans cet amour… nous serions que misère et monotonie. Aveugle, sourd et muet. Triste, sans pensée, sans sentiment, sans émotion. La vie serait terne et fade. Nous serions sans force et sans énergie…  elle se déroulerait dans la nuit, le froid et le silence.

Ce n’est pas l’artiste qui a fait l’art… c’est la notion d’art qui a fait de l’artisan, un artiste.

 

Il est quelque part rassurant de constater que le geste du peintre ou du dessinateur, aux moyens matériels toujours aussi restreints. Même si la qualité et les techniques des outils a changée… on s’aperçoit que cela n’a fondamentalement pas changé depuis les grottes ornées !... où pigments de couleurs minérales, pinceaux en poils d’animaux, mine de plomb ou fusain sont toujours là !

Certes, les toiles ont pris la place aux parois rugueuses et inégales. Quoique !...

 

De toute évidence pour moi… l’art est un aspect de la liberté.

L’artiste est en même temps un introverti qui frise bien souvent la névrose obsessionnelle. Animé de diverses impulsions à tendances extrêmement fortes. Pas tous !...

L’artiste n’est pas le seul à vivre ou d’être animé d’une vie imaginative. Le domaine intermédiaire de la fantaisie jouit de la faveur générale de l’humanité, et tous ceux qui sont privés de quelque chose, y viennent chercher compensation et consolation.

Le véritable artiste peut davantage donner à ses rêves éveillés une forme telle qu’ils perdent tout caractère personnel. Mais il sait également les embellir de façon à dissimuler complètement leurs origines suspectes.

Il possède le pouvoir mystérieux de modeler des matériaux donnés, des mots ou des sons… jusqu’à en faire l’image fidèle de la représentation existante dans sa fantaisie, et de rattacher à cette représentation de sa fantaisie inconsciente… une somme de plaisir suffisante pour masquer ou supprimer les refoulements.

L’artiste poète et le romancier… à fur et à mesure qu’ils nous parlent, ou qu’ils écrivent… des nuances d’émotions et de pensées nous apparaissent, qui pouvaient être représentées en nous depuis longtemps, mais qui demeuraient invisibles. Telle l’image photographique qui n’a pas encore été plongée dans le bain où elle se révèlera. L’artiste est ce révélateur.

 

Pour conclure…

Assimiler la beauté de l’art, à la beauté naturelle de tout ce qui nous entoure, on est automatiquement tenté de chercher une explication finaliste à toutes ces propriétés, et d’y voir autant de moyens disposés en vue d’une fin inconnue.

C’est justement l’erreur !... La beauté de la nature n’est en rien comparable à celle de l’art.

L’imagination de celui ou celle qui regarde, n’a pas seulement une fonction régulatrice… mais elle est aussi constructive.

L’œuvre d’art n’a pas de fin… Elle n’existe que si on la regarde.

 

DEBUSSY disait :

« L’art est le plus beau des mensonges… Il faut désirer qu’il reste un mensonge… sous peine de devenir une chose utilitaire, triste comme une usine ».

 

Qu’importe le butin…je préfère vivre simplement, dans la lumière, et libre !

L’art est le carburant qui anime la flamme de ma vie. Contrairement à la majorité de mes semblables, je vis dans des rêves qui me tiennent en marge de la réalité souvent trop dure. Mes rêves me soutiennent et m’aident à poursuivre mon chemin, en quête d’une vie meilleure. Je préfère garder toute ma tête pour mes rêves, et avoir un œil qui reste entrouvert sur les réalités de notre monde. Alors… pour survivre, je les raconte et je les peins.

Je n’ai peut-être pas de fortune… encore moins d’actions placées en bourse… Mais j’affirme, et je peux le dire sans honte et sans gène, que oui… l’art m’a enrichi… et j’en suis conscient.

 

Je terminerai cet exposé par une citation d’Antoine BOURDELL, grand sculpteur contemporain :

« Le secret de l’art, c’est l’amour… Celui qui ne donne pas sa vie à l’œuvre doit renoncer à animer la pierre ».