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« Le visible n’est qu’illusion »

 

Le nu artistique…C’est la grande obsession de notre siècle… « La représentation d’un nu (féminin ou autre) »… suscite beaucoup de questions morales et de vertus.

 « Où fini la représentation d’un nu artistique ?... et où commence la pornographie ? ».

Et pourquoi ne parle-t-on jamais de l’érotisme ?

Personnellement, j’ai tendance à dire que ces trois dénominations sont identiques. Je m’explique.

1 / - Tout dépend de l’état d’esprit de celui (ou de celle) qui regarde.

Regarde t-il (elle) la scène comme une simple image plate ?...

Ou bien, regarde t-il (elle) la scène d’une façon pure et libérée ?... C’est ce que l’on appelle le plus couramment « Avoir un regard, ou une démarche artistique ».

2 / - Est-ce que l’artiste a tenté d’envoyer un message caché, ou est-ce qu’il a voulu représenter artistiquement et esthétiquement une scène de nu ?... Les deux thèses sont liées.

Dans le premier cas, on regarde l’œuvre sans apriori, d’une façon naturelle… Ou bien, dès le départ, on est coincé dans des aprioris et des principes culturels néfastes d’un autre âge.

Dans le deuxième cas… soit que l’auteur a peint une vision fantasmagorique ou névrotique bien à lui, et l’aura retransmise d’une manière choquante pour celui qui regarde.

Soit, qu’il a voulu faire ressortir la beauté telle qu’il (elle) l’a ressent ?… (Situation ou attitude physiquement symbolique).

 

Représenter un nu qui offre aux regards du spectateur non initié, la totalité de son corps sans aucun vêtement, montrant bras et jambes, ventre ou dos, sexe et seins (symboles d’attirances sexuelles forts), posant dans une attitude sensuelle et évocatrice… pourrait être pris pour certain, pour une proposition provocante… voire, pornographique.

Cette catégorie d’individus salissent tout, car ils sont toujours négatifs, intolérant, jaloux, envieux.

Par nature, l’homme (l’espèce humaine) a tendance à être un manipulateur, tricheur, illusionniste, fourbe, malheureux, car, mal dans sa peau… Il se contredit sans cesse, et fait le contraire de tout ce qu’il dit, pense ou fait. Son seul plaisir, ou plutôt sa seule force d’existence est de démonter tout ce qui marche et tout ce qui est beau. Il voit la laideur et la saleté partout ! (Le péché pour certain)

En général, cette catégorie ne porte pas l’amour en eux. Ils se ferment les yeux, tout en regardant hypocritement entre leurs doigts entr’ouverts et se bouchent les oreilles, tout en les tendant.

Jacques BREL les appelait « Les amputés du cœur ! »

 

Pour ceux qui ont un regard artistique… les vrais contemplateurs… les chercheurs… ce sera une visualisation et une attitude sereine, harmonieuse et naturelle devant l’œuvre. Ils rechercheront avant tout ce qui représente la beauté, le charme et la sensualité. Bref… la nature à l’état brut, dans son plus simple appareil… et tenteront de découvrir l’émotion, un sentiment, la tendresse… voire, l’innocence.

Ils iront chercher la « substantifique moelle », c’est-à-dire : retenir ce qu’il y a de meilleur, de plus beau, ou de plus profond.

 

Lorsque l’on sait regarder la nature… rien n’est laid. Que ce soit chez les animaux, ou la nature végétale. Admirez les montagnes, le coucher de soleil sur la mer, la brume du matin, l’arbre qui se déploie, le cours d’eau, l’envole d’un oiseau, la fleur qui est en train de naître… etc… La beauté est partout !

 

Les sentiments que le nu artistique doit (en principe) éveiller, doivent rester platoniques. Il doit cependant déclencher des désirs et des émotions d’intensités variables… pas envers le modèle… mais exciter l’imagination à la recherche d’une idée, du beau, du bon, du vrai, sensuel et véritablement sincère. Ce sont des sentiments qui doivent nous envahir de douceur, d’amour et de bonheur

C’est la grande différence avec le porno… où l’on donne envie de se « taper » la fille ou l’homme qui y sont représentés. Du style : « J’aimerais bien être à sa place ! ». C’est ça la vulgarité.

 

Le visible n’est qu’illusion.

 

En fait, tout dépend là encore de l’état d’esprit de chacun, de son éducation, de son ouverture mentale, spirituelle et culturelle.

Nous sommes tous influencé par notre culture, notre lieu de naissance, notre famille, les autres, notre niveau social, notre environnement, les superstitions, les religions et les croyances ancestrales, ainsi que notre héritage venus de très loin. Nous sommes tous influencé par nos ADN. Cette mémoire est gravée en nous, et elle resurgit à n’importe quel moment, et pour n’importe quoi.

C’est notre esprit qui crée et qui catégorise ce que l’on voit. C’est le juge de notre inconscient qui impose.

 

Le sens de la beauté n’est pas le même pour tous. Il possède des degrés différents.

La véritable beauté fait diversion dans notre esprit. C’est le plaisir conscient qui nous offre et rend possible cette jouissance inconsciente et profonde. C’est tout simplement la vie qui se manifeste dans notre émotion esthétique. Car la vie est avant tout toujours présente en nous. C’est le temps qui passe… La vie, la mort, les joies, les peines, le bonheur, l’amour, la libido, le sexe… etc… C’est ce que l’on peut appeler « l’élan vital ».

Le plaisir esthétique nous donne l’impression d’une sortie du temps, hors de notre temps personnel… d’une résolution dans notre conflit intérieur. Nous avons tous besoin d’avoir des émotions esthétiques pour que la vie puisse continuer à se métamorphoser et à se construire en nous. Nous sommes tous à la recherche du bonheur, de la vérité et du beau. Nous avons tous besoin de la beauté pour éprouver nos différences.

Le grand mystère… comme le corps physique… nous effraie. Nous avons peur de ce que nous ne comprenons pas. La beauté, elle, nous propose une expérience heureuse et saine du mystère.

Si le désir de comprendre élève l’homme… l’obsession de tout expliquer risque parfois de le rabaisser. Pire !... de lui interdire le bonheur… et de lui fermer les portes de l’amour véritable.

La beauté esthétique nous donne, ou plutôt, déclenche la force, l’espoir, et redonne bien souvent l’élan vital, et l’accès à l’imagination. Elle est l’occasion d’un investissement libidinal.

Peu importe l’âge que l’on a !... Ici, c’est la maturation de l’appréhension et de la compréhension du beau qui sont les plus importants. La beauté ne se regarde pas… elle se vit, et on la ressent vibrer à l’intérieur de nous. Elle éveille nos désirs les plus fous !

 

Le visible n’est qu’illusion.

 

L’œil est la fenêtre de l’âme… dit-on souvent. Et c’est vrai !

L’œil accomplit le prodige d’ouvrir à l’âme le domaine bienheureux des choses.

Il faut toujours regarder au-delà de ce que l’on voit dans la réalité. Il ne faut pas s’arrêter à une image plate (telles une photo ou une peintre)… il faut aller au-delà, aller dedans… aller voir ce que l’on ne montre pas, de ce que l’on ne dit pas… ou plutôt, de ce que l’on ne perçoit pas encore.

Le peintre (ou l’écrivain) représente inconsciemment visuellement son inconscience. Il se peint, lui-même. Il peint ce qu’il est, ce qu’il ressent, et tente de représenter l’image qu’il a, dedans.

Il rend visible, l’invisible.

Le rêve n’est pas observable. L’artiste lui, rend cela possible.

Pour comprendre ce que l’on voit, il faut devenir soi-même « matière ». Il faut s’identifier au sujet que l’on souhaite reproduire pour comprendre et savoir comment il est fait.

Le but étant, pour l’artiste, de passer de la matière à la lumière (Je ne parle pas de la lumière artificielle, comme le projecteur électrique… non. Mais de communier avec le divin).

L’artiste doit pouvoir prendre conscience de sa psyché. (La psyché étant un ensemble de manifestations conscientes et inconscientes de notre personnalité).

 

Ce qui rend les choses difficiles… c’est que le monde nous semble fixe et immobile. Il n’en est rien.

Tout est en mouvement, tout se déplace. Bougeons de 50 cm sur le côté… le paysage change… et nous avons une autre perception visuelle de la nature. Donc de la vie.

L’œil de l’humain ne voit qu’une infime petite partie du réel (les 7 couleurs de l’arc en ciel). Certains animaux voient l’ultra violet… mais pas au-delà. Imaginez tout ce qui se passe autour sans que le perçoive !... c’est inimaginable !

 

Prenons l’exemple du peintre qui regarde son modèle. L’évidence s’éclate devant ses yeux.

Mais ce qu’il voit, a déjà changé. Ce n’est qu’un écho de la vérité. Car le corps bouge sans cesse lui aussi, tout comme le reste de la nature. C’est le temps qui passe inexorablement.

La vérité n’est ni la chose que l’on voit, ni cette unité globale du monde sensible à la limite du monde intelligible… tout est éphémère.

Seule, reste la mémorisation de l’artiste… car, tout est basé sur la mémoire… d’un temps furtif.

 

Par conséquent, le plus difficile pour un artiste peintre qui souhaite représenter un nu, est de tout dire très vite, synthétisant au plus près en fixant sa vision sur une toile. Ce qui n’est pas une mince affaire. Comment va-t-il s’en sortir ?... Comment cela va-t-il être perçu par le spectateur ?

Comment exprimer la sensibilité, l’émotion d’un regard, la courbe harmonieuse de ses bras ou de son visage, la rondeur magique d’un sein, le galbe d’un ventre, le frémissement d’une cuisse ?

Comment faire ressentir au spectateur non averti, l’odeur enivrante de sa peau, ou le doux parfum de son sexe ?

Rien n’est plus difficile !

Tout est une question de vibrations, d’ondes, et d’acte d’amour.

 

Contrairement à la photographie qui fixe un moment définitif dans le temps. Il rend la chose morte et sans vie. La photo fait abstraction des vibrations et des ondes du corps. Elle reste en surface. C’est une vision qui n’est plus la vérité. (Je n’ai rien contre la photographie. J’aime en faire… mais la démarche n’est plus la même)

Dans l’écriture, on peut tout décrire par des mots savamment pensés.

Par la musique, suggérer par des vibrations différentes et subtiles.

 

Le sexe de l’homme est tout aussi beau que celui de la femme. Mais comme ils n’ont pas la même utilité, ils sont forcément différents. Ils sont faits pour s’unir. Mais ils restent beaux tous les deux. La nature est bien faite.

 

Étant artiste peintre depuis de nombreuses années… je connais toutes ces difficultés d’expressions.

Dire tout, le plus simplement possible, raconter une longue histoire en une œuvre lisse, étalée uniquement sur une surface plate, n’est pas aisé.

L’artiste est malheureusement souvent mal compris… peut-être parce qu’il s’est mal exprimé, ou parce qu’il n’a pas su trouver la bonne technique. Peu importe ! Être maladroit est l’expression de la sincérité.

 

 

Pour terminer mes propos… je reviendrai sur certaines représentations anciennes.

Les Japonais (pour ne citer qu’eux… car il y a eu les Égyptiens de l’antiquité, l’Afrique…)… avaient le culte de la sensualité et de l’érotisme (L’érotisme n’a rien à voir avec la pornographie). Ils n’avaient aucun problème avec ça. Cela faisait parti de la nature et de la vie courante. (Voir estampes Niskike-e de type Shunga)… Tout comme les représentations sur certains Temples de l’Inde, où des personnages sont représentés dans des attitudes sexuelles coutumières de leurs habitudes dans leurs vies quotidiennes.

La grande particularité est qu’ils n’ont jamais été considérés comme des représentations pornographiques. Nous sommes là, sur d’autres plans, et dans une dimension hautement plus sacrée.

La pornographie… est la représentation de sujets, de détails dits « obscènes », ayant un caractère sexuel vulgaire. On y montre tout, dans les moindres détails. Le but est bien évidemment de susciter de l’excitation sexuelle sans sentiment à caractère essentiellement lucratif, et financier. La pornographie fait vendre... tout comme la mort violente.

Ce mot est apparu par les puritains et les religieux du siècle des Lumières. Ce mot désignait en général la prostitution.

La pensée philosophique dite « pornographique » a toujours été marginalisée, puisque l’histoire occidentale l’a opposée à la vertu et à la morale. Bel exemple de l’hypocrisie humaine !

C’est également contraire à certains principes et à certaines cultures religieuses d’aujourd’hui, dépassées et débordées, estimant que la pornographie peut détruire les relations sentimentales.

Il est prouvé que c’est faux (dans certain cas !)

Chez les animaux, la pornographie n’existe pas. Ils restent naturels, c’est tout.

 

Pratiquement tout artiste a, un jour ou l’autre de sa vie, représenté des scènes érotiques poussées.

Cela fait parti du développement normal de tous créateurs qui sont en recherche de la beauté et de la vérité.

L’adolescent(e) enrichit la croissance de sa libido, à condition qu’il soit bien entouré et bien informé.

La pornographie n’est pas la réalité… c’est un manque total de respect du corps de la femme et de l’homme, et surtout pour l’espèce humaine.

 

L’érotisme…  c’est le contraire.

C’est juste une question émotionnelle personnelle qui invite à l’éveil du désir.

L’émotion provoque le désir, à condition qu’il ne soit pas vulgaire et reste respectueux. C’est céder au charme et à la recherche du plaisir. L’émotion vient de l’esprit, donc, de l’invisible… Le désir, c’est le corps physique visible. Ce sont deux plans différents à ne pas confondre.

Le plus difficile s’est d’équilibrer les deux.

C’est un ensemble de phénomènes qui éveillent le désir sexuel, souvent causés par diverses représentations culturelles et artistiques.

Apercevoir une cuisse, un sein, une épaule… un regard, un sourire… suscitent l’éveil des sens et principalement l’attirance. C’est, bien sur, étroitement lié à la sexualité. Elle exprime et suscite une excitation émotionnelle et sensuelle… indissociablement physique et mental. Elle provoque des projections mentales (fantasmes).

L’érotisme se distingue de l’amour qui est un sentiment.

Jouant sur l’imagination, l’érotisme vient d’un jugement esthétique (conscient ou non) lié à l’attrait sexuel.

Par conséquent, le fait d’imaginer des situations et des attitudes sexuelles peuvent nous faire basculer très vite vers une certaine forme de pornographie. C’est-à-dire ; dans le mauvais goût, dans la vulgarité, et dans le malsain. Attention de ne pas trop s’écarter de la vérité, et de redresser la barre vers l’érotisme et l’esthétique.

 

Jean-Marie MANSON – 6 août 2017